La lutte contre les maladies tropicales négligées (MTN) nécessite l’implication des leaders religieux et des élus locaux. De la prévention aux traitements de masse, ces acteurs jouent un rôle déterminant. Grâce à leur influence et à leur proximité avec les communautés, ils sont essentiels pour garantir l’adhésion au traitement de masse et assurer l’efficacité des interventions de santé publique.
Les MTN représentent un problème de santé majeur au Bénin, affectant particulièrement les populations rurales. Parmi les MTN les plus courantes figurent la filariose lymphatique, la trypanosomiase, la leishmaniose et les infections à vers intestinaux. Selon les dernières statistiques, environ 4 millions de Béninois sont à risque de filariose, tandis que la trypanosomiase touche principalement les zones rurales. Environ 10 % de la population est affectée par les vers intestinaux. Ces dernières années, des progrès ont été réalisés grâce à des campagnes de traitement de masse et de prévention menées par le ministère de la Santé à travers le Programme National de Lutte contre les Maladies Tropicales Négligées (PNMTN). Dans cette lutte, le rôle des leaders religieux et des élus locaux est crucial.
« Les leaders religieux de la religion traditionnelle sont très préoccupés par la lutte contre les maladies tropicales négligées », confie Hounongan Kpodjihou Dagbénombakin. Selon lui, les leaders religieux au Bénin jouent un rôle de porte-parole clé pour la sensibilisation et l’adhésion. Ils exercent une influence considérable sur les croyances et comportements des populations. Leur pouvoir spirituel et leur autorité morale en font des alliés de poids dans la lutte contre les MTN. Lors des campagnes de traitement de masse, telles que celles visant à lutter contre la filariose lymphatique ou l’éléphantiasis, leur soutien est crucial pour encourager les individus à participer et à accepter les traitements.
Les messages de santé publique portés par les leaders religieux bénéficient d’une grande confiance au sein des communautés. En cas de résistance ou de réticence à la prise de médicaments, ces leaders apaisent les craintes, démystifient les traitements et promeuvent les bienfaits des programmes sanitaires. « D’abord, si nos fidèles ne sont pas en bonne santé, nous-mêmes, nous ne serons pas à l’aise. Nous les sensibilisons à adopter de bonnes habitudes pour prévenir ces maladies. Aussi, si nous constatons que l’un d’eux est malade, nous faisons ce que nous pouvons. Si nous ne pouvons pas, nous les orientons vers la médecine moderne », ajoute Hounongan Kpodjihou Dagbénombakin.
Elus locaux : Des piliers indispensables
Les élus locaux jouent également un rôle fondamental dans la lutte contre les MTN, notamment en assurant la logistique nécessaire pour la distribution des traitements. Selon Florent Zekpon, conseiller élu local à Houeyiho, les élus locaux sont responsables de l’organisation des points de distribution, du recrutement des agents de santé communautaire et de la mobilisation des ressources locales. En outre, ils servent souvent d’interlocuteurs privilégiés pour les partenaires internationaux et les ONG, facilitant ainsi la collaboration entre les différents acteurs et garantissant que les communautés les plus éloignées bénéficient des soins nécessaires. Les élus locaux jouent un rôle clé dans la planification, la coordination et l’organisation des campagnes de traitement de masse. Étant proches des populations, ils connaissent bien les zones les plus affectées par les maladies tropicales négligées et sont capables de cibler efficacement les interventions.
« Souvent, lorsque nous observons ces maladies dans nos populations, nous leur conseillons d’aller dans les centres de santé et d’adopter des pratiques d’hygiène dans leurs maisons », souligne M. Florent Zekpon, appelant tous les élus à jouer leur rôle de terrain pour contribuer à la bonne santé de la population. Selon lui, la réussite des campagnes de traitement de masse contre les MTN dépend largement de la collaboration entre les leaders religieux, les élus locaux et les autorités sanitaires. Une approche collaborative permet de regrouper les ressources et d’optimiser l’impact des interventions. Lorsque les autorités locales et les leaders religieux travaillent ensemble, ils créent un environnement propice à l’adhésion de la population et à la participation active aux programmes de traitement de masse.
Vers une approche collaborative et une couverture universelle
L’engagement des leaders religieux et des élus locaux doit être soutenu par une formation continue et des ressources adaptées. Cela permet non seulement d’assurer une plus grande couverture des traitements, mais aussi de renforcer la résilience des communautés face aux maladies tropicales négligées. Il est également essentiel de développer des stratégies de communication adaptées aux contextes locaux, afin que les messages de santé publique soient compris et acceptés par les populations cibles. Le dialogue entre les acteurs locaux et les autorités sanitaires doit être fluide et constant pour garantir la réussite des interventions.
À l’instar de M. Zekpon, les acteurs de terrain rencontrés confirment que les leaders religieux et les élus locaux représentent des piliers indispensables dans la lutte contre les maladies tropicales négligées et dans la réussite des programmes de traitement de masse. Leur influence, leur proximité avec les communautés et leur capacité à mobiliser les populations en font des partenaires stratégiques pour éradiquer ces maladies. En renforçant leur engagement et en soutenant les efforts de coordination, il est possible d’atteindre un impact durable et de garantir une couverture universelle des traitements.
Victorin FASSINOU