Violences Basées sur le Genre (VBG) : Les chefs religieux appelés à plus d’action et à aller au-delà du sermon

Alors que les Violences Basées sur le Genre continuent de faire des ravages dans les foyers béninois, des voix s’élèvent pour interpeller les leaders religieux. Musulmans, chrétiens ou adeptes de la tradition, tous sont appelés à intensifier leur engagement, au-delà des sermons, pour faire de leurs lieux de culte des bastions de protection et de respect des droits humains.

« Traitez bien vos femmes et soyez gentils envers elles », prêche avec conviction El-Hadj Moutawakil Boukari Malik, président de l’Union des imams de l’Atlantique. En se référant aux enseignements du prophète Mahomet, il appelle à l’équilibre et au respect mutuel dans le couple. « Elles ont des droits sur vous, comme vous en avez sur elles », rappelle-t-il aux fidèles musulmans. Un message fort, qui souligne que l’islam ne tolère aucune forme de violence contre les femmes, tant que les obligations conjugales sont réciproquement respectées.

Du côté de la tradition, Hounongan Kpodjihou Dagbenombakin ne mâche pas ses mots : « Dans mon couvent, lorsqu’un adepte lève la main sur une femme, il est sanctionné. » Dans le temple Thron, la femme occupe une place centrale, voire sacrée. « Sans la femme, rien ne se fait. Nous devons être exemplaires. » Pour lui, il est impératif que chaque Hounongan prenne à cœur cette lutte, en l’intégrant aux rituels, aux conseils et aux échanges communautaires.

Même son de cloche chez les chrétiens. Atcheffon Noé, senior évangéliste dans l’Église du Christianisme Céleste, insiste : « Le rôle du leader religieux, c’est de conduire les fidèles vers le bien. La sensibilisation contre les VBG fait désormais partie intégrante de nos enseignements. » Il exhorte ses pairs de toutes confessions à assumer pleinement leur responsabilité d’éducateurs spirituels et sociaux. Ces déclarations sont encourageantes. Elles témoignent d’une prise de conscience réelle. Mais au-delà des paroles et des prises de position, des acteurs sociaux plaident pour des actions plus visibles, plus fermes, plus structurées.

Au-delà du sermon, un devoir de protection

Fernande Adekou, assistante sociale et militante pour les droits des femmes, est formelle : «Les Violences Basées sur le Genre ne sont pas une fatalité. En brisant le silence et en agissant ensemble, on peut construire une société plus juste. » Pour elle, les leaders religieux doivent sortir d’une posture d’observateurs ou de simples prêcheurs, pour devenir des acteurs de changement au quotidien. « Le respect des femmes doit être intégré à la catéchèse, aux prêches du vendredi, aux enseignements traditionnels. Les victimes doivent pouvoir se confier à leurs guides spirituels sans crainte d’être jugées ou rejetées. Les auteurs doivent être dénoncés, rééduqués, encadrés. » Mme Adekou rappelle qu’un véritable travail d’ancrage social peut venir des chefs religieux, dont l’influence dans les quartiers et villages reste incontournable. Elle appelle à une mobilisation forte pour accompagner l’État et les organisations civiles : éducation des jeunes générations, diffusion de messages clairs, refus catégorique de toute justification de la violence, quelle qu’en soit la forme. « En faisant de la lutte contre les VBG une priorité, les chefs religieux peuvent contribuer à un Bénin plus sûr et plus égalitaire. ». L’un des leviers les plus puissants de la transformation sociale reste en effet la foi. Or, lorsque cette foi est canalisée vers le respect de la dignité humaine, elle peut désamorcer des siècles de violences normalisées.

La foi comme levier de paix, pas d’oppression

Les leaders religieux ne manquent pas d’arguments dans les textes sacrés pour lutter contre les violences. Ce qu’il leur reste à faire, c’est d’unir leurs voix, de multiplier les initiatives concertées, d’oser condamner publiquement les dérives, même dans leurs propres rangs. Former les jeunes religieux, soutenir les femmes victimes, collaborer avec les structures d’État, prêter les lieux de culte à des campagnes de sensibilisation : autant de pistes concrètes encore trop timidement explorées.Le plaidoyer pour un engagement accru n’est pas un procès. C’est une invitation à faire plus, à faire mieux, à faire ensemble. Car la foi, quelle que soit sa forme, peut être une lumière pour guider vers le respect de la vie, l’égalité des sexes et la fin des violences.

Victorin FASSINOU

Avec le soutien de CeRADIS-ONG, membre de l’Alliance Droits et Santé

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